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ONZIÈME LEÇON

J M Charcot



DE L'HYPERESTHÉSIE OVARIENNE.

SOMMAIRE. - hystérie locale des auteurs anglais. - Douteur ovarienne ; sa fréquence; considérations historiques. -Opinion de M. Briquet.
Caractères de l'hyperesthésie ovarienne. - Son siège exact. - Aura hystérique premier noeud ; - globe hystérique ou second noeud ; - phénomènes céphaliques ou troisième noeud. - Le premier noeud a son point de départ dans l'ovaire. - Lésions de l'ovaire ; desiderata.
Rapports entre l'hyperesthésie ovarienne et-les autres accidents de-l'hystérie locale.
De la compression ovarienne..- Son influence sur les attaques. - Manière de la pratiquer. - La compression ovarienne comme moyen d'arrêter ou de prévenir les convulsions hystériques est connue depuis longtemps : Son application dans les épidémies hystériques. - Épidémie de saint Médard Les secours. - Analogies qui existent entre l'arrêt des convulsions hystériques par la compression de l'ovaire et l'arrêt de l'aura épileptique par la ligature d'un membre.
Conclusion au point de vue de la thérapeutique. - Observations cliniques,

Messieurs,

Par la dénomination assez pittoresque et certainement très pratique d'Hystérie locale ou partielle, local hysteria, les médecins anglais ont l'habitude de désigner la plupart des accidents qui persistent d'une manière plus ou moins permanente dans l'intervalle des attaques convulsives chez les_ hystériques, et qui permettent presque toujours, en raison des caractères qu'offrent ces accidents, de reconnaître la grande névrose pour ce qu'elle est, même en l'absence des convulsions
L'hémianesthésie, la paralysie, la contracture, les points douloureux fixes, siégeant sur diverses parties du corps ( rachialgie, pleuralgie, clou hystérique) appartiennent, d'après cette définition, à l'hystérie locale.
I Parmi ces symptômes, il en est un qui, en raison du rôle prédominant qu'à mon sens il joue dans la clinique de certaines formes de l'hystérie, me paraît mériter toute votre attention. Je veux parler de la douleur qui siège dans l'un des flancs, surtout dans le gauche, mais qui peut occuper aussi les deux flancs', aux limites extrêmes de la région hypogastrique. Je fais allusion à la douleur ovarienne ou ovarique, dont je vous ai dit un mot dans la dernière séance ; nais, je ne veux pas employer sans réserve celte dénomination avant d'avoir justifié, et j'espère que cette tache me sera facile, l'hypothèse qu'elle consacre implicitement.
Cette douleur, je vous la ferai pour ainsi dire toucher du doigt, dans un instant; je vous en ferai reconnaître tous les caractères, en vous présentant cinq malades qui forment la presque totalité des hystériques existant actuellement parmi les 160 malades qui compose la division consacrée dans cet hospice aux femmes atteintes de maladies convulsives, incurables, et rèputées exemptes d'aliénation mentale.
II Vous voyez déjà par cette simple indication que la douleur iliaque est chose fréquente dans l'hystérie; c'est là un fait reconnu depuis longtemps parla majorité des observateurs.
Qu'il me suffise de citer, pour les temps déjà éloignés de nous, Lorry et Pujol, qui ont plus particulièrement relevé l'existence des douleurs hypogastriques et abdominales chez les hystériques.
Il est singulier, après cette mention, de voir que Brodie, qui, le premier peut-être, a reconnu tout l'intérêt clinique de l'étude'\ de l'hystérie locale; ne traite pas d'une manière spéciale de la douleur abdominale (1).
Il semble être de tradition que le sens pratique des chirurgiens anglais soit attiré par les difficultés cliniques que présentent les symptômes locaux de l'hystérie. M. Skey, qui à cet égard s'est fait le continuateur de Brodie, dans une série très
intéressante de leçons sur les formes locales ou chirurgicales de l'hystérie (2), comme il les appelle, décrit avec complaisance la douleur iliaque ou de la région ovarienne, très-commune à son avis, et qui, suivant lui encore, contrairement du reste à la réalité, se' rencontrerait surtout dans le côté droit. .
Vous savez que, en France, Schutzenberger, Piorry et Négrier ont insisté tout spécialement sur ce symptôme qu'ils rattachent sans hésitation a la sensibilité anormale de l'ovaire.
En Allemagne, Romberg à, sur ce point, suivi Schutzenberger; toutefois, il y a lieu de remarquer que, parmi nos contemporains, les auteurs allemands,, pour la majeure partie, passent à peu près complètement sous silence tout ce qui est relatif à la douleur hypogastrique. Tels sont, par exemple, Hasse et Valentiner. Il est clair par là que ce symptôme, après avoir joui d'une certaine faveur, en raison sans doute des considérations théoriques qui s'y rattachent, se trouve aujourd'hui en quelque sorte démodé.
Les symptômes aussi, vous le voyez, ont leur destin: Habent sua jasa... Je ne serais pas étonné que l'influence, d'ailleurs si légitime, exercée par le livre de M. Briquet, ne soit pour beaucoup dans ce résultat. Il convient maintenant de voir jusqu'à quel point nous devons suivre cet auteur éminent dans la voie qu'il nous trace.
III. Ce n'est pas, tant s'en faut, que M. Briquet n'ait pas re-u connu l'existence très fréquente des douleurs abdominales fixes chez les hystériques. Il a même créé un mot pour désigner ces douleurs -- coelialgie, de ventre, et un mot, bien que ce ne soit qu'un mot, c'est déjà quelque chose qui arrête l'esprit. Dans 200 cas d'hystérie sur 450, M. Briquet a rencontré la coelialgie. Toutefois, je dois-vous faire remarquer que, sous ce nom, il comprend à la fois les douleurs de la partie supérieure de l'abdomen et les douleurs hypogastrique et iliaque;-mais il est convenu que ces dernières comptent parmi les plus communes.
Au premier abord, il semble donc qu'il n'y sit qu'un désaccord apparent entre M. Briquet et ses prédécesseurs. Or, il n'en est rien, et voici ,ou est l'abîme qui les sépare.. -
Tandis que MM. Schutzenberger, Piorry et Négrier placent dans l'ovaire le siège principal, le foyer, pour ainsi dire, de la douleur iliaque, M. Briquet n'y voit qu'une simple douleur musculaire, une myodynie hystérique. Suivant lui: 10 la douleur du pyramidal ou de l'extrémité inférieure du muscle droit a été prise bien à tort pour une douleur utérine; 2° la douleur de l'extrémité inférieure du muscle oblique répondrait à a prétendue douleur ovarique, -telle est la thèse de M: Briquet.
IV. Recherchons ensemble, Messieurs, sur quel fondement elle repose. Pour arriver à ce but, je vais faire appel aux observations que j'ai été à même de recueillir dans cet hospice sur une assez grande échelle. Je vais donc décrire cette douleur telle que j'ai appris à la connaitre.
1 ° Tantôt c'est une douleur vive, très-vive même: les malades ne peuvent supporter le moindre attouchement, le poids des couvertures, etc ; -elles s'éloignent brusquement, par un mouvement instinctif, du doigt investigateur. Joignez à cela un certain degré de gonflement de l'abdomen, et vous aurez l'ensemble clinique de la fausse péritonite, -- spurious peritonitis des médecins anglais. Il est évident, qu'ici les muscles et la peau elle-même sont de la partie. La douleur occupe alors une assez grande étendue en surface, et, partant, il est assez difficile de la localiser. Cependant Todd (1), et c'est là une remarque dont ,j'ai reconnu plusieurs fois l'exactitude, signale dans. certains cas une hyperesthésie cutanée circonscrite à une portion arrondie de la peau, ayant 2 à 3 pouces de diamètre. Cette hyperesthèsie siégerait en partie dans l'hypogastre, en partie dans la fosse iliaque, et répondrait, selon cet auteur, à la région de l'ovaire.
2° D'autres fois, la douleur n'est pas spontanément accusée; il faut la chercher par la pression, et, en pareille circonstance, on note les phénomènes suivants: a) la peau est partout anesthésiée; - b) les muscles, s'ils sont lâches, peuvent être pincés, et soulevés sans douleur -c) cette première exploration montre que le siège de la douleur n'est pas dans la peau ni dans les muscles. II est par conséquent indispensable de pousser l'investigation plus loin, et, en pénétrant en quelque sorte dans l'abdomen, à raide des doigts,- on arrive sur le véritable foyer de la douleur
Cette manoeuvre permet de s'assurer que le siège de la douleur en question est à peu prés fixe, qu'il est toujours à peu pris le même : aussi n'est-il pas rare de voir les malades le désigner avec une concordance parfaite. Sur une ligne horizontale passant par les épines iliaques antérieures et supérieures, faites toniber les lignes perpendiculaires qui limitent latéralement l'épigastre et à' l'intersection , des lignes verticales avec l'horizontale se trouve le foyer douloureux qu'accusent les malades et que la pression exercée à l'aide du doigt met d'ailleurs en évidence.'
L'exploration profonde de cette région fait reconnaître aisément la portion dl détroit supérieur qui décrit une courbe à concavité interne : c'est là un point de repère. Vers la partie moyenne de cette crête rigide, la main rencontrera le. plus souvent un corps ovoïde, allongé transversalement et qui, pressé contre la paroi osseuse, glisse sous les doigts. Lorsque ce corps est tuméfié, ainsi que cela se présente fréquemment, i1: peut offrir le volume apparent d'une olive, d'un petit neuf,. mais avec un peu d'habitude, sa présence peut être facilement constatée alors même qu'il reste bien au-dessous de ces dimensions.
C'est à ce moment de l'exploration que l'on provoque' surtout la douleur, et qu'elle se révèle avec des caractères pour ainsi dire spécifiques. 11 ne s'agit pas là d'une douleur banale, car c'est une sensation complexe qui s'accompagne de tout ou partie des phénomènes de l'aura hysterica, tels qu'ils se produisent d'eux-mêmes à l'approche des crises,, et cette sensation provoquée, les malades la, reconnaissent pour l'avoir ressentie cent fois:
En somme, Messieurs, nous venons de circonscrire le foyer initial de l'aura', et du même coup, nous avons provoqué des irradiations douloureuses vers l'épigastre. (premier noeud de, l'aura, dans. le langage de M. Piorry j, compliquées parfois de nausées et de vomissements; puis, si la pression est continuée, surviennent' bientôt des palpitations de coeur avec fréquence extrême dl pouls, et enfin se développe al cou la sensation dl globe hystérique (deuxième noeud).
En ce point, s'arrête dans les auteurs la description des irradiations ascendantes qui constituent l'aura hystérique. Mais, d'après ce que j'ai observé, l'énumération ainsi limitée serait incomplète, car une analyse attentive permet de reconnaître, le plus souvent, certains troubles céphaliques qui ne sont évidemment que la continuation de la même série de phénomènes. Tels sont, s'il s'agit par exemple de la compression de l'ovaire gauche, des sifflements intenses qui occupent l'oreille gauche et que les malades comparent au bruit strident que produit le sifflet d'un chemin de fer; -une sensation de coups de marteau frappés sur la région temporale gauche ;o puis, en dernier lieu, une obnubilation de la vue marquée surtout dans l'oeil gauche.
Les mêmes phénomènes se montreraient sur les parties correspondantes du côté droit, dans le cas où l'exploration porterait, au contraire, sur l'ovaire droit.
L'analyse ne peut être poussée plus loin; car, lorsque les choses en sont à ce point, la conscience s'affecte profondément, et, dans leur trouble, les malades n'ont plus la faculté de décrire ce qu'elles éprouvent. L'attaque convulsive éclate d'ailleurs bientôt, pour peu qu'on insiste.
A part les phénomènes qui ont trait à la dernière phase de l'aura hystérique (phénomènes céphaliques), je viens de vous rappeler, Messieurs, toute la série de phénomènes obtenus dans l'expérience de Schutzenberger, et nous sommes ainsi conduit à reconnaître, avec cet éminent observateur, que la pression du flanc dans la région ovarienne ne fait que reproduire artificiellement la série des symptômes qui se développent spontanément chez les malades dans le cours naturel des choses.
Je n'ignore pas que, suivant M. Briquet, l'aura hystérique débuterait, dans l'immense majorité des cas, par le noeud épigastrique ; je n'ignore pas non plus que, à l'appui de son assertion, cet auteur cite des chiffres imposants. Mais il ne faut pas toujours courber la tête devant les chiffres, et l'on est en droit de se demander si 31. Briquet, qui s'est montré quelque peu sévère à l'égard des ovaristes, ne s'est pas laissé à son tour entraîner par quelque préoccupation qui lui aura fait négliger d'inscrire dans la série des phénomènes de l'aura la douleur aque initiale.
Si j'en juge d'après mes propres observations, toujours le point iliaque précède en date, de si peu que ce soit, dans le développement de t'aura, le point épigastrique, et constitue par conséquent le premier anneau de la chaîne.
V: Il me reste, Messieurs, à établir que c.: point particulier où réside la douleur iliaque des hystériques correspond au siège même de l'ovaire, et j'aurai par là rendu très-vraisemblable,, sinon démontré d'une façon absolue, que le corps ovulaire, douloureux, d'où partent les irradiations de l'aura hystérique spontanée ou provoquée, est bien l'ovaire lui-même.
On se fait, en général, je le crois du moins, une idée imparfaite du lieu exact qu'occupe l'ovaire pendant ta trie. Lors-lue l'abdomen étant ouvert, les intestins relevés, on trouve dans le petit bassin, derrière l'utérus, en avant du rectum, les annexes de l'utérus flasques, flétris, comme ratatinés, il ne s'agit pas là évidemment d'un état répondant aux conditions vitales; et il est clair qu'après la mort les plexus artériels des trompes et des ovaires, dont la richesse et les propriétés érectiles ont été si bien mises en lumière par mon ami le professeur Rouget (de Montpellier), ont depuis longtemps cessé leur rôle. Il ne faut pas oublier, d'un autre côté, que l'ouverture du corps change très-certainement les rapports réels des annexes de l'utérus. Cela est si irai que, sur les cadavres congelés (4), l'ovaire occupe une situation moins inférieure, et qui rappelle dans une certaine mesure celle qu'on lui reconnaît chez le nouveau-né. Sur cette coupe, empruntée à l'Atlas de M. Legendre, coupe pratiquée perpendiculairement au grand axe du cadavre d'une femme de 20 ana, supposé couché, et qui passe à 2 centimètres au-dessus du pubis, vous voyez un des ovaires coupé en deux, tandis que l'autre est resté au-dessus de la surface de section ; d'après cela, chez ta femme adulte, l'ovaire serait situé à la hauteur et même un peu au-dessus du détroit supérieur, débordant avec la trompe vers les fosses iliaques. Ce résultat concorde de tous points avec celui que donne a palpation pratiquée pendant la vie. J'ajouterai que si, sur un cadavre reposant sur la table d'autopsie, au niveau du point correspondant à celui où nos hystériques accusent la 'douleur iliaque, on enfonce, d'avant en arrière et de haut en bas, une longue aiguille, on a grand" chance, -je m'en suis assuré plusieurs fois, de transfixer l'ovaire.
Cette situation de l'ovaire parait d'ailleurs avoir été implicite. meut reconnue par M. le Dr Chéreau dans ses excellentes Etudes sur les maladies de l'ovaire (l), lorsqu'il dit que chez les femmes, dont les parois abdominales ne sont pas trop résistantes, on peut reconnaître a tuméfaction ou même seulement la sensibilité de l'ovaire. L'introduction du doigt par le rectum ne serait, d'après notre auteur, un moyen d'exploration supérieur que dans les cas où la paroi abdominale oppose des obstacles insurmontables.
Messieurs, après toutes les explications dans lesquelles je viens d'entrer, je crois pouvoir conclure que c'est bien à l'ovaire, à l'ovaire seul, qu'il faut rapporter la douleur iliaque fixe des hystériques. A la vérité, à de certaines époques, et dans les cas intenses, la douleur, par un mécanisme que je n'ai pas à indiquer pour le moment, s'étend jusqu'aux muscles, à la peau elle-même, de manière à satisfaire à la description de M. Briquet; mais je ne saurais trop, lé répéter, ainsi limitée aux phénomènes extérieurs, la description serait incomplète, et le véritable foyer de la douleur resterait méconnu.
VI. Il conviendrait de rechercher maintenant quel est l'état anatomique de l'ovaire dans le cas -où il devient le siège de la douleur iliaque des hystériques. Sur ce point, dans l'état actuel des choses, nous ne pouvons malheureusement vous donner que des renseignements assez vagues. I1 existe parfois une tuméfaction plus ou moins prononcée de l'organe, ainsi que cela avait lieu dans le fait d'ovarite blennorrhagique rapporté dans le mémoire de M. Schutzenberger. Mais c'est -là une circonstance plutôt exceptionnelle, et il importe de re l'inflammation commune de l'ovaires peut exister avec tous ses ,caractères, sans que les irradiations décrites plus haut surviennent, soit spontanément, soit sous l'influence des provocations. M. Briquet n'a pas failli à faire ressortir cette circonstance, et, cette fois, il était parfaitement dans son droit. Il faut donc reconnaître hautement que toute inflammation ovarienne n'est pas indistinctement propre à provoquer le développement de l'aura hystérique. Le gonflement ovarien chez les hystériques faut parfois complètement. défaut ; d'autres fois, il est peu prononcé; et il paraît assez vraisemblable que la tuméfaction dont l'ovaire est le siège, en pareil cas, résulte d'une-turgescence vasculaire analogue à celle qui se montre à la suite de certaines névralgies. L'anatomie pathologique ne nous a fourni, jusqu'ici, aucune donnée positive à cet égard : on pourra donc, quant à présent, désigner indifféremment l'état de l'ovaire dont il s'agit, sous les noms d'hyperkinésie (Swediaur), d'ovaralgie (Schutzenberger),.
d'otarie (Négrier), car peu importe le nom, en définitive, lors-e que le fait est bien constaté.
Vll. L'ovaire étant accepté pour point de départ de l'aura' hystêrique au moins dans un groupe de cas il n'est pas' sans intérêt de montrer actuellement qu'une relation importante, en quelque sorte intime, existe entre la douleur ovarienne et les autres accidents de l'hystérie locale.
Vous pouvez reconnaître, en effet, Messieurs, chez les malades que je vous présente, une concordance remarquable du siège de la douleur iliaque et du mode de localisation des symptomes concomitants. Je ne reviendrai pas sur lés phénomènes céphaliques de l'aura qui, ainsi que je vous le faisais remarquer tout à l'heure, s'accusent du même côté que la douleur ovarienne: je me bornerai à faire ressortir que l'hémianesthésie, la parésie et la contracture des membres occupent le côté gauche lorsque l'ovarie siège à gauche, et inversement lorsqu'elle siège à droite. Je vous ferai remarquer aussi que, quand-la douleur ovarienne siège à la fois à droite et à gauche, les autres accidents' se montrent bilatéraux prédominant toutefois du côté où' la douleur iliaque est le plus intense.
A plusieurs reprises nous avons assisté Chez quelques-unes de nos maades à un brusque changement de siége de la douleur ovarienne, entre autres, chez a nommée Ler.... Lorsque chez cette femme l'ovarie venait à prédominer du côté gauche, les symptômes céphaliques de l'aura, la contracture des ,membres, etc.., offraient temporairement leur maximum de développement de ce même côté, pour prédominer ensuite du côté droit, alors que l'ovaire droit se montrait de nouveau le plus douloureux.
Il ne faut pas oublier que l'ovaralgie parait être un phénomène constant, permanent par excellence, dans la forme d'hystérie qui nous occupe, de telle sorte que, jointe à quelque autre indice de la même catégorie, elle pourra vous conduire sur la voie; du diagnostic dans les cas difficiles.
VIII. Il me reste, Messleurs, à entrer dans l'exposition de faits qui seront peut-être considérés par vous comme la partie la plus saillante de cette étude. Ces faits, en réalité, sont de nature, si je ne me trompe, à mettre encore davantage en relief le rôle vraiment prédominant de l'ovaralgie dans l'une des formes de l'hystérie.
Vous venez de voir comment a compression méthodique de l'ovaire peut déterminer la production de l'aura, ou même parfois de l'accès complet. Je veux essayer de vous démontrer maintenant qu'une compression - plus énergique est capable d'enrayer le développement de l'accès lorsqu'il en est à son début ou même d'y couper court, lorsque déjà l'évolution des accidents convulsifs est plus ou moins avancée. C'est du moins ce que vous pourrez observer très nettement chez deux des malades que j'ai mises sous vos yeux. Chez elles, l'arrêt déterminé par la compression, lorsque celle-ci a été convenablement pratiquée, est total, définitif. Chez deux autres, cette manoeuvre modifie seulement les phénomènes de l'accés, à un degré variable, sans en amener toutefois la . cessation.-Et veuillez bien remarquer qu'il ne s'agit pas, chez elles toutes, de l'hystérie convulsive commune, vulgaire, si je puis m'exprimer ainsi, mais bien de l'hystérie convulsive considérée dans son type unanimement reconnu comme le plus grave, je veux parler de l'hystéro-épilepsie.
Supposons que, chez une de ces femmes, l'accès vienne d'éclater. La malade est tombée à terre tout à coup, en poussant un cri ; la perte de connaissance est complète. La rigidité tétanique de tons les membres qui, en général, inaugure la scène, est poussée à un haut degré; le tronc est fortement recourbé en arrière, l'abdomen proéminent, très-dislendu et très-résistant.,
La meilleure condition, pour une démonstration parfaite des effets de la compression ovarienne, en pareil ces, est que la malade soit étendue horizontalement sur le sol, ou, si cela est. possible, sur un mateas, dans le décubitus dorsal. Le médecin, alors, ayant un genou en terre, plonge le poing fermé dans - celle des fossés iliaques que l'observation antérieure lui aura démontré être le siége habituel de la douleur ovarienne.
Tout d'abord, il lui faut faire appel à toute sa force, afin-de vaincre la rigidité des muscles, de l'abdomen. Mais, dès que, celle-ci une fois vaincue, la main perçoit la résistance` offerte - par le détroit supérieur du bassin, la scène change, et la résolution des phénomènes convulsifs commence à se produire.
Des mouvements de déglutition plus ou moins nombreux, et parfois très bruyants; ne tardent guère à se manifester; a conscience alors presque aussitôt se réveille, et, à cet instant, tantôt la malade gémit et pleure, criant qu'on lui fait mal, tel est le cas de Marc tantôt, au contraire, elle accuse un soulagement, dont elle témoigne sa reconnaissance. -- " Ah! c'est bien! cela fait du bien! " s'écrie toujours, en pareille circonstance, la nommée Cen.....
Le résultat, quoi qu'il en soit, est en somme toujours le même, et pour peu que vous insistiez sur la compression, pendant deux, trois ou quatre minutes, vous êtes à pu près assurés que tous les phénomènes de l'accès vont se-dissiper comme par enchantement. Vous pourrez, d'ailleurs, varier l'expérience, et à votre gré, en suspendant un moment la compression pour la reprendre, arrêter l'accès ou le laisser se reproduire, en quelque sorte, autant de fois que voua le voudriez. .
Une fois que l'on a définitivement triomphé de la résistance, très-sérieuse du reste, qu'offrent toujours, à l'origine, les parois abdominales, il n'est pas nécessaire d'user de toutes ses forces et l'application des deux premiers doigts de la main sur le siège présumé de l'ovaire suffit pour, obtenir l'effet désiré. Toutefois, la manoeuvre, surtout si elle doit être prolongée durant quelques minutes, est toujours assez fatigante pour l'opérateur. J'ai songé à la modifier. Peut-être pourrait-on avoir recours au sac rempli de grains de plomb que M. Lannelongue a mis en usage dans un tout autre but, ou encore à l'application d'un bandage approprié : c'est une question à étudier. Quant à présent, les personnes du service, au courant du procédé, le mettent journellement en pratique chez les malades auxquelles il est réellement utile.
1X. Il est assez singulier, Messieurs, qu'un procédé, dont l'exécution est aussi simple, et qui, incontestablement, peut rendre des services réels, soit tombé, comme il l'est de nos jours, en désuétude complète. Ainsi que je vous lai laissé pressentir, l'invention de ce procédé, tant s'en faut, ne m'appartient pas; peut-être remonte-t-elle aux temps les plus antiques; toujours est-il qu'elle est certainement antérieure au XVI siècle. Voici d'ailleurs ce que quelques recherches, faites un peu à la hâte parmi les livres les plus poudreux, et par conséquent les moins fréquentés de ma bibliothèque, m'ont appris à ce sujet.
Willis, dès le XVII siècle, dans son Traité des maladies convulsives (1), s'exprimait ainsi qu'il suit. " Il est certain, dit-il, que le spasme convulsif qui vient du ventre est arrêté et qu'on l'empêche de monter au cou et à a tète, par une compression de l'abdomen, faite à l'aide des bras enacés autour du corps, on à l'aide de draps bien serrés. " Il raconte ailleurs être parvenu ui-même à arrêter un accès, par une pression énergique exécutée avec les deux mains réunies sur le bas-ventre. Mais déjà Mercado (1513) avait depuis longtemps conseillé les frictions sur le ventre, dans le but de réduire la matrice qu'il supposait se déplacer, suivant la doctrine ancienne (2). Un de ses compatriotes, Monardés, procédait, parait-il, plus résolument il-plaçait, pendant l'accès, sur le ventre des malades, une grosse pierre.
il ne paraît pas, toutefois, que cette pratique sa soit beaucoup répandue; je ne la vois, en effet, mentionnée ni dans Laz. Rifière, ni dans F. Hoffmann, Boerhaave, seul, au commencement du XVIII siècle, insiste de nouveau sur la compression de l'abdomen dans l'attaque hystérique; elle doit être produite, suivant lui, à l'aide d'un coussin, fortement serré par des draps placés entre les fausses côtes et la crête iliaque. On soulage ainsi, dit-il, presque à coup sûr les malades, pourvu que la sensation de globe n'ait pas encore dépassé le diaphragme..
Dans les temps modernes, Récamier, remettant en honneur cette méthode, comme vous le voyez déjà fort ancienne, plaçait sur le ventre des malades un coussin sur lequel un aide venait s'asseoir. Son exemple n'a guère été suivi, que je sache, que par Négrier, directeur de l'École de médecine d'Angers, dont le Recueil de faits pour servir à l'histoire des ovaires et des affections hystériques chez la femme, publié en 1858, ne parait pas avoir eu d'ailleurs un bien grand retentissement. Le procédé de Négrier est plus méthodique que celui mis en ouvre par ses prédécesseurs; c'est l'ovaire qui, dans la compression, devient pour lui le point de mire. " Une forte et large pression, exercée par l'intermédiaire de la main sur la région ovarienne, suffit, dit Négrier, dans plusieurs cas pour enrayer ou supprimer complètement l'attaque convulsive. "
Mais aissons pour un instant de côté la pratique régulière, et recherchons quels ont été. les procédés à l'aide desquels, dans certaines épidémies hystériques célèbres, les assistants portaient secours aux convulsionnaires. Parmi ces moyens de se cours mis en oeuvre, nous trouvons signalée une pratique fort curieuse à étudier, et dont l'idée première, selon toute vralsemblance, aura dû être suggérée par quelque convulsionnaire. Je veux parler de la compression du ventis: il est, en effet, 'des hystériques qui, en proie aux premiers tourments de l'aura, mettent instinctivement d'elles-mêmes en action la compression ovarienne. Tel est le cas, par exemple, d'une de nos malades, la nommée Gen., dont je vous ai entretenu déjà. Cette femme a pris depuis longtemps l'habitude d'arrêter le développement de ses accès par la compression de l'ovaire gauche; elle y réussit le plus souvent lorsque l'invasion du mal n'a pas été par trop rapide. Dans le cas contraire, elle fait appel aux assistants et les prie de l'aider dans cette manoeuvre.
Examinons d'un peu plus prés ces faits empruntés à l'histoire des épidémies convulsives: il y a la matière à une étude rétrospective qui n'est pas sans intérêt.
Le savant Hecker, parlant des individus atteints de la danse de Saint-Jean (t), dit qu'ils se plaignaient fréquemment d'une grande anxiété épigastrique, et demandaient qu'on leur comprimât le ventre avec des draps.
Mais c'est surtout l'épidémie, dite de Saint-Médard, qui nous fournit sur ce sujet les documents les plus intéressants. Vous n'ignorez pas comment elle survint, alors que l'exaltation religieuse des jansénistes, persécutés à propos de a bulle Unigenitus, était portée à son comble. L'épidémie, qui prit naissance sur le tombeau du diacre Paris, mort en 1727, a présenté deux périodes bien distinctes (2).
La première a été remarquable surtout -- du moins à notre point de vue - par a guérison d'un certain nombre de malades, parmi lesquels figurent plusieurs cas bien avérés de contracture permanente des hystériques (3); dans la seconde, ont prédominé des convulsions plus ou moins singulières, mais qui, eu somme, ne diffèrent en rien d'essentiel de celles qui appartiennent à l'hystérie lorsqu'elle revêt la forme épidémique. or, c'est à ce moment-là qu'apparaît, dans l'épidémie de SaintMédard,, la pratique des secours.
En quoi ces secours consistaient-ils? Pour la plupart des cas, il s'agissait là de manSuvres ayant pour but de déterminer une forte compression de l'abdomen ou de le frapper violemment à l'aide d'un instrument ou d'un objet quelconque. Ainsi, il y avait : 1° le secours administré à l'aide d'un pesant chenet dont . on frappait le ventre à coups redoublés; 2° le secours dit du pilon, qui ne s'éloigne guère du précédent; 3° dans un autre cas, un homme joignait les deux poings et les appuyait de toutes ses forces sur le ventre de la convulsionnaire, et, pour mieux faire encore, il appeait d'autres hommes à son aide; 4° trois, quatre ou même cinq personnes' montaient sur le corps de la malade; -une convulsionnaire, appelée par ses coreligionnaires soeur Margot, affectionnait plus particulièrement ce mode de secours ; 5° il est un cas, enfin, où l'on disposait de longues bandes que l'on tirait fortement à droite et à gauche, afin de comprimer l'abdomen. -- Ces secours' quel que fût d'ailleurs leur mode d'administration, étaient toujours, parait-il, suite d'un grand soulagement.
Hecquet, médecin de l'époque, ne vouait voir' dans ces convulsions rapportées par d'autres à une influence divine, qu'un phénomène naturel, - et en cela il avait parfaitement raison,. `tais je ne puis plus être de son avis' lorsque, dans son livre intitulé " Du Naturalisme des convulsions, " il prétend que les secours n'étaient autres que des pratiques dictées par la lubricité. Je ne vois pas trop, pour mon compte, ce que a lubricité pouvait avoir à faire avec ces coups de chenet' et de pilon administrés avec une extrême violence, bien que je n'ignore pas ce qu'est capable d'enfanter, dans ce genre, un goût -dépravé. Je crois qu'il est beaucoup plus simple et beaucoup plus légitime d'admettre- que îes secours, - à part les amplifications suggérées par l'amour de la notoriété; -- répondaient à une pratique tout empirique et dont le résultat était de produire un amendement réel dans les tourments de l'attaque hystérique.
X. Vous avez certainement saisi' Messieurs, les analogies' gal existent entre cet arrêt des convulsions hystériques ou hystéro-épileptiques, déterminé par la compression de l'abdomen et l'arrêt qu'on obtient quelquefois des convulsions par la compression ou la ligature des membres d'où partent' en pareil ;cas,' les phénomènes de l'aura; et c'est ici peut-être le lieu de vous rappeler qu'une brusque flexion du pied fait cesser tout à coup, ainsi que l'a montré Brown-Séquard, a trémulation convulsive de l'épilepsie spinale, observée dans certains cas de myélite,
Vous n'ignorez pas qu'en pathologie expérimentale ces faits cliniques trouvent jusqu'à un certain point leur interprétation. Je ne puis entrer dans les détails, pour le moment; qu'il me sur, Ose de vous remettre en mémoire que, chez les animaux, de nombreuses expériences mettent en évidence la suspension de l'excitabilité réflexe de a moelle épinière par le fait de l'irritation des nerfs périphériques. Ainsi, l'expérience de Herzen nous montre que chez une grenouille décapitée, c'est-à-dire placée dans une condition excellente pour exalter à son maximum l'excitabilité réflexe de a moelle, si cette partie des centres nerveux est irritée dans sa partie inférieure, il sera impossible, tant que l'excitation subsistera, de mettre en jeu l'excitabilité des r membres supérieurs. Et, inversement, si chez une grenouille, préparée de la même façon, vous entourez d'un lien fortement serré les membres supérieurs, tant que la ligature persistera, l'excitation des membres inférieurs ne sera pas suivie de mouvements réflexes. C'est du moins ce que démontre une expérience de Lewisson.
Toujours est-il que si ces faits expérimentaux sont d'une analyse plus facile, ils ne sont pas encore, dans l'état actuel de la science, plus aisément explicables que les phénomènes correspondants observés chez l'homme.
XI. Je ne puis insister plus longuement, car le temps me presse. J'aurais voulu cependant vous montrer l'intérêt qu'il y e, au point de vue pratique, à supprimer les accès d'hystérie grave ' ou à en modérer, tout au moins, l'intensité. Mais ce côté de la a question sera plus convenablement mis en lumière quand j'aurai fait ressortir, dans une des prochaines séances, les conséquences qu'entraîne la répétition des accès, ou autrement dit l'état de mal hystéro-épileptique. Je me bornerai, quant à présent, à formuler ainsi qu'il suit une, des conclusions qui ressortent de la présente étude
La compression énergique de l'ovaire douloureux n'a pas d'incidence directe sur la plupart des symptômes permanente de l'hystérie, tels que contracture, paralysie, hémianesthésie, etc.. mais elle a une action souvent décisive sur l'attaque convulsive dont elle peut diminuer l'intensité et, parfois même, déterminer l'arrêt.
XII. Je dois, en terminant, Messieurs, faire passer devant vos yeux les malades que j'ai eues surtout en vue dans la description qui précède, et faire ressortir les particularités les plus saillantes qu'elles offrent à l'observation.
Cas I. -- Marc..., 23 ans, atteinte d'hystéro-épilepsie depuis l'âge de 16 ans. On ne sait trop à quelle cause il faut, chez elle, rattacher l'affection. Quoi qu'il en soit, au point de vue de l'hystérie locale, elle nous offre : une hémianesthésie, de l'ovarie, de la parésie, tout cela du côté gauche. Elle est, de plus, sujette-à-des vomissements fréquents et a présenté de l'achromatopsie dans l'Sil gauche.
Les attaques sont précédées par une aura caractéristique; les phénomènes prodromiques partent de' l'ovaire gauche et ,les symptômes céphaliques sont très-accusés. Quant aux attaques elles-mêmes, elles se composent de trois périodes: a) convulsions tétaniformes, épileptiformes, écume; - b) grands mouvements du tronc et des membres inférieurs (période des contorsions) ; dans ce temps la malade prononce des paroles bizarres, et parait être en proie à un délire sombre; - c) pleurs, rires, annonçant la fin de l'accès. Chez elle, on détermine un arrêt prompt et absolu de tous les phénomènes par la compression de l'ovaire gauche.
Cas II. - Caf..., 21 ans, a vu l'hystérie débuter à 45 ans. Lés mauvais traitements qu'elle subissait de a part de son père, adonné aux excès de boisson, et plus tard la prostitution, ont sans doute exercé urge certaine action étiologique. L'hystérie locale, ici, est encore plus marquée que-dans le- premier cas. Nous avons à observer à droite une hémianesthésie, une douleur ovarienne une contracture permanente avec trémulation du membre inférieur.
L'attaque s'annonce par une aura bien nette, partant de l'ovaire droit et se terminant par des symptômes céphaliques très évidents. Les convulsions, surtout toniques, se compliquent d'accidents épileptiformes; C... se mord la langue, écume, etc.. La période des contorsions vient ensuite et est très-accentuée. souvent, l'attaque se termine par des mouvements de bassin, avec constriction laryngée, pleurs, urines abondantes. Chez elle, aussi, la pression ovarienne modère l'intensité des phénomènes de l'accès sans toutefois l'arrêter. Dans les premiers mois de l'année, cette malade a été atteinte d'un état de mal hystéro-épileptique sur lequel nous reviendrons dans une prochaine leçon !4).
Cas III. - Legr... Geneviève est née à Loudun; singulière coïncidence! C'est, vous le savez, le pays où s'est passé le triste drame dont Urbain Grandier a été a victime. Geneviève est âgée d-e 28 ans; l'hystérie date de l'époque de la puberté. Parmi les symptômes permanents de l'hystérie locale, nous observons chez elle une hémianesthésie gauche mal accusée, une douleur ovarienne gauche avec tumeur facile à constater enfin un état mental bizarre.
L'aura est très caractérisée, et, ce qui prédomine, ce sont les palpitations cardiaques et les symptômes céphaliques. En ce qui concerne les attaques elles-mènes, elles se divisent en trois périodes: 1° convulsions épileptiformes, écume et stertor; 2° puis, grands mouvements des membres, de tout le corps; 3° enfin, période de délire, pendant laquelle elle raconte tous, les événements de sa vie à la fin des grands accès.
Parfois la malade; dans cette dernière phase, a des hallucinations; elle voit des corbeaux, des serpents; de plus elle s'abandonne à une sorte de danse; et alors elle nous offre, à l'état embryonnaire, pour ainsi dire et sous la forme sporadique, un spécimen de ces danses du moyen-âge décrites sous le nord d'épidémies saltatoires. A ce propos, je vous ferai remarquer que certains cas d'hystérie, constituant en quelque sorte des variétés dans l'espèce, présentent à l'état rudimentaire les diverses formes convulsives qui se montrent à un degré beaucoup plus accentué dans les épidémies. C'est du reste là un point qu'a parfaitement développé Valentiner dans son intéressant travail sur l'hystérie.
Chez Geneviève, a compression de l'ovaire- détermine un arrêt, pour ainsi dire soudain, de l'attaque. Elle se rend nettement compte de cette influence, car elle-même essaie de comprimer la région qui donné naissance à l'aura ou, lorsqu'elle n'y peut parvenir, elle réclame, ainsi que nous l'avons déjà dit, le secours des assistants.
Cas IV. - Ler..., âgée de 48 ans, est une malade bien connue de tous les médecins qui depuis plus de 20 ans ont fréquenté cet hospice à divers titres. C'est, en d'autres termes, un cas célèbre dans les annales de l'hystéro-épilepsie. Vous trouverez relatée, dans la thèse dé M. Dunant (de Genève), la première partie de son histoire. Ler... a cessé d'être réglée il y a quatre ans, et malgré cela les accidents nerveux persistent. Nous vous faisions reconnaître, tout à l'heure, dans Geneviève, le tarentisme sous un aspect rudimentaire; Ler... est une démoniaque, une possédée; ou encore elle présente l'image à peine affaiblie d'une de ces femmes qu'on nommait Jerkers dans les Camp-meetings méthodistes et qui offraient dans leurs crises les attitudes les plus effrayantes. (Voy. fig. 19 et 20.)
.L'origine vraisembable des accidents nerveux, chez Ler... mérite d'être signalée. Elle a eu, comme elle le dit, une série de peurs : 1° à 11 ans, elle a été épouvantée par un chien enragé; 2° à 16 ans, elle a été saisie d'effroi à la vue du cadavre d'une femme assassinée; 3° à 16 ans, nouvelle, frayeur déterminée par des voleurs qui, au moment où elle traversait un bois, se précipitèrent sur elle pour lui enlever l'argent qu'elle portait.
L'hystérie locale se compose, chez elle, d'une hémianesthésie, d'otarie, de parésie et par moments de contracture des membres supérieurs et inférieurs occupant le côté droit. Parfois les mêmes , phénomènes envahissent le côté gauche, et, alors, conformémentà notre description, se présente une ovarie double avec anesthésie double, etc.. les attaques, qui s'annoncent par une aura ovarique bien caractérisée, sont marquées d'abord par des convulsions épileptiformes et tétaniformes: après quoi se produisent de grands mouvements, à caractère intentionnel, dans lesquels la malade, prenant les poses les plus effrayantes, rappelle les atti udes que l'histoire prête aux démoniaques (période des contorsions.. (Fig. 19 et 20.) -
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Fig. 19. - Attitude de Ler... pendant l'attaque -:période des contorsions. (Fac-simile d'un croquis fait d'après nature.)
A ce moment de l'attaque, elle est en proie à un délire qui roule évidemment sur les événements qui paraissent avoir déterminé les premières crises: elle adresse des invectives furieuses à des personnes imaginaires :Scélérat-voleurs! brigands! Au feu ! au feu ! Oh lés chiens 1 on me mord! Autant de souvenirs, sans doute, des émotions de la jeunesse.












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Fig, 20. - Attitude de Ler:.. pendant l'attaque période des contorsions. Fac-similé d'un croquis fait d'après nature,),
Lorsque la partie convulsive de l'accès, est terminée, il survient en règle générale : 1° des hallucinations de la vue; la malade voit des animaux effrayants, des squelettes, des' spectres; 2° une paralysie de la vessie; 3° une paralysie du pharynx; 4° enfin, une contracture permanente plus ou moins prononcée de la langue.
Ces derniers accidents rendent parfois nécessaire pendant plusieurs jours le cathétérisme vésical et l'alimentation parla sonde oesophagienne.
La compression de l'ovaire, chez Ler., est presque de nul effet sur les convulsions.
Ces V. - Vous connaissez déjà cette malade; il s'agit d'Etchev..., qui nous a fourni les éléments de notre leçon sur l'ischurie hystérique (4). Nous relevons encore, dans ce cas, une hémianesthésie, de l'achromatopsie, de la contracture et de l'ovarie à gauche. Les attaques sont surtout tétaniformes, toniques. Nous n'avons pas eu, jusqu'ici, l'occasion d'essayer chez elle l'influence de a compression ovarienne sur les convulsions.